|
Navarrais |
Au 19ème siècle à Bourisp, on élève des juments, essentiellement pour la production de mules, indispensables pour transporter toutes sortes de charges dans les pentes escarpées de la montagne, vers l'Espagne souvent. L'instituteur Verdier qui, comme tous les instituteurs de France, rédigea en 1887 la monographie du village le confirme: "La commune ne possède pas de troupeaux de bêtes à laine, c’est une des rares localités de la vallée qui ne s’adonnent pas à l’élevage de la race ovine. On y élève des bêtes à cornes et des juments en vue surtout de la production des mules. L’une et l’autre de ces espèces sont en général de fort petite taille. L’espèce chevaline appartient au cheval dit Navarrais, petit, sobre et robuste, l’espèce bovine appartient à la race dite d’Aure. Elle se fait généralement remarquer par sa robe gris de feu et la vivacité de son allure.
On pourrait améliorer ces deux races par le croisement. A cet effet a été établie une monte d’étalons du dépôt de Tarbes à Arreau. Les essais ne sont pas encore satisfaisants. Cela tient à ce que tous les animaux sont envoyés de quatre à cinq mois dans la haute montagne et y restent exposés à toutes les intempéries; les animaux de sang ne résistent pas à ces brusques variations de températures.
.../...
A Bourisp se trouve une monte de chevaux et baudets du pays.
Le nombre total des animaux dont nous venons de parler est d’environ cinq cents dont une centaine environ pour l’espèce chevaline."
Pendant toute l'année, les juments reproductrices étaient sous la responsabilité du gardien communal qui les accompagnait pendant quatre à cinq mois à la montagne. Les archives départementales des Hautes-Pyrénées recèlent quelques documents qui nous disent comment cela était organisé.
Le cahier des charges pour l'année 1856 nous indique par exemple que, comme pour les porcs, la fonction de gardien de juments était attribuée au moins demandeur par un système de sous-enchères.
" Le gardien s'oblige à garder les juments pour un an c'est à dire du premier janvier jusqu'au trente et un décembre, il s'oblige en outre d'avertir les propriétaires qui auraient une jument en amour pour la faire descendre de la montagne tout comme s'il y survenait quelque bête malade pour la retirer s'ils le jugent convenable"
|
Picasso 1905 - Le meneur de chevaux- période rose et bleue |
"Le gardien s'oblige à suive les juments sur la montagne dans tous les endroits où il sera possible de suiter".
Un autre document, à l'état de brouillon, apporte quelques précisions: le gardien suit les bêtes en montagne, il "s'oblige à habiter" la cabane communale et dispose d'un jour par mois pour descendre se ravitailler.
Un dernier document - non daté - dresse l'"Etat des juments qui ont fait partie du troupeau commun de la commune de Bourisp qui doivent participer au payement de la somme de trente francs montant du prix de l'introduction de l'étalon ... à repartager à 35 juments Monte 86 centimes à chacune."
Outre la méthode de calcul originale (voir infra) utilisée pour obtenir le coût de 86 centimes par saillie, ce document nous donne aussi une idée du nombre d'éleveurs à Bourisp à cette époque, une vingtaine.
|
Pas toujours simple de manipuler plume et encrier! |
Le calcul:
La facture est de 30 francs pour 35 juments, soit 86 centimes par jument. Privé de calculette, le rédacteur choisit de calculer en "sous", un franc valant 20 sous et donc un sou valant cinq centimes.
- 30 francs fois 20 sous = 600 sous
- divisés par 35 = 17,2 sous environ
- 17,2 sous fois 5 centimes = 86 centimes.
C'est bien 86 centimes la quote-part pour une jument.
Reste a vérifier:
- 86 cts fois 5 = 430 cts pour 5 juments
- 86 cts fois 3 = 258 cts pour 3 juments ou 2580 cts pour 30 juments
- soit pour 35, 430+2580= 3010cts soit environ 30 francs.
Vers 1960, avec 1 sou, on achetait un carambar...